Emploi dans l’énergie : état des lieux et perspectives

L’Agence Internationale de l’Énergie publie un rapport sur la situation de l’emploi dans le secteur de l’énergie dans le monde. Elle pointe le dynamisme et les créations d’emplois qui le caractérisent mais s’inquiète d’un risque de pénurie de main d’œuvre.

L’emploi dans l’énergie dans le monde : forte poussée des ENR

La nécessité de décarboner les mix énergétiques entraîne une croissance du secteur des énergies renouvelables qui se hisse à 40 % entre 2021 et 2023.

Fait significatif qui témoigne d’un vrai changement de paradigme : le secteur des ENR (énergies renouvelables) emploie aujourd’hui plus de travailleurs que celui des énergies fossiles !

En effet, en 2022, le secteur de l’énergie représentait 67 millions d’employés, dont 35 millions travaillaient dans les énergies renouvelables.

Il est à noter que la moitié de la croissance de l’emploi du secteur des ENR concerne le solaire, l’éolien, les voitures électriques, la production de batteries, les métaux critiques et les pompes à chaleur. L’ensemble représente 9 millions de travailleurs.

Si le solaire pèse lourd dans le monde des ENR, actuellement, c’est pourtant la construction de voitures électriques et de leurs batteries qui porte la croissance du secteur.

Des risques de pénurie de main d’oeuvre

Une des spécificités du secteur de l’énergie est son besoin en main d’œuvre qualifiée, qui s’élève bien au-dessus de celui du reste de l’économie (36 % des emplois contre 27 %).

Or pour le moment, constate l’AIE, la demande des employeurs est supérieure à l’offre de compétences, le nombre de personnes formées n’évoluant pas assez vite.

Le segment de l’installation et de la construction souffre particulièrement de pénurie alors qu’il représente environ la moitié des emplois à créer dans l’énergie d’ici 2030. Le manque se fait sentir notamment du côté des électriciens et des chauffagistes aux États-Unis et en Europe.

Le rapport de l’agence souligne ainsi l’importance de développer des formations et une main d’œuvre qualifiée et outillée dans chaque région du monde.

La solution des reconversions

Pour répondre à la demande en main d’œuvre du secteur des ENR, il existe une solution intéressante : chercher des candidats dans le vivier des travailleurs déchus des énergies fossiles.

L’AIE estime que la moitié des professionnels du secteur des énergies fossiles qui font face à un risque de chômage possède les compétences pour occuper un emploi dans les ENR.

Enfin, alors que des suppressions d’emplois sont prévues dans le secteur du charbon et de ses mines, l’AIE souligne la possibilité d’un transfert de compétences vers les métaux critiques.

D’ici 2030, 8 millions de jobs devraient être créés dans les ENR et 2,5 millions de jobs devraient être détruits dans les énergies fossiles.

Attractivité des métiers

Outre le potentiel offert par les reconversions, il existe selon l’AIE une autre raison d’être optimiste : les salaires sont élevés dans le secteur de l’énergie !

Les installateurs de panneaux solaires gagnent par exemple, d’après le rapport de l’agence, 40 % de plus que les installateurs dans les télécoms ou les couvreurs.

Cependant, cette attractivité varie en fonction des métiers : certaines professions de l’efficacité énergétique dans le bâtiment souffrent par exemple en France d’une mauvaise image et sont associées à une pénibilité et des risques professionnels importants.

La transition énergétique aura-t-elle vraiment un impact sur l’emploi ?

Le Conseil d’analyse économique a publié une note le 15 novembre qui conclut au faible impact de la transition énergétique sur l’emploi… autant en termes de création que de destruction d’emplois. L’industrie serait le secteur le plus concerné par les pertes d’emplois, mais dans des proportions relativement faibles.

Rappelons donc que l’impact des transformations en cours dans l’énergie sur l’emploi est encore assez incertain.

Néanmoins, l’institut France Stratégie arrivait récemment dans une de ses notes aux mêmes conclusions que l’AIE : il y a bien déjà un manque de main d’œuvre difficile à combler… et cela risque d’empirer si rien n’est fait.

Rappel : les grandes tendances à l’œuvre dans l’énergie aujourd’hui

Le secteur de l’énergie est à l’aube d’une transformation majeure, alimentée par des avancées technologiques et des impératifs environnementaux. Ainsi, 5 grandes tendances impactent fortement aujourd’hui la croissance et l’emploi dans le secteur de l’énergie.

Transition vers les énergies renouvelables

Les énergies renouvelables, telles que l’éolien et le solaire, connaissent une croissance exponentielle. Les gouvernements du monde entier adoptent des politiques incitatives, encourageant le d’une production d’énergie propre, créant ainsi de nouveaux marchés et impulsant la croissance économique du secteur.  

Stockage de l’énergie

La nécessité de stocker l’énergie de manière efficace devient de plus en plus cruciale. Les avancées dans les technologies de stockage, comme les batteries de nouvelle génération, ouvrent la voie à une intégration plus poussée des énergies renouvelables dans les réseaux électriques. Cela crée des opportunités d’innovation et de nouveaux emplois dans le secteur des technologies de stockage.  

Électrification des transports

L’électrification des transports gagne du terrain avec entre autres la montée en puissance des véhicules électriques. Les entreprises du secteur de l’énergie s’adaptent en investissant dans des infrastructures de recharge et en explorant des solutions novatrices pour répondre à la demande croissante d’énergie électrique dans le secteur des transports.  

Intelligence Artificielle (IA) et Internet des Objets (IoT)

L’IA et l’IoT sont devenus des catalyseurs majeurs d’innovation dans le secteur de l’énergie. Des solutions intelligentes permettent une gestion plus efficace des réseaux électriques, la prévention des pannes, et l’optimisation des opérations. Cela ouvre la porte à de nouveaux emplois spécialisés dans les domaines de la data science et de la cybersécurité.  

Emplois verts et compétences spécialisées

La transition énergétique génère une demande croissante de compétences spécialisées. Des professionnels « verts », tels que les installateurs de panneaux solaires, les experts en efficacité énergétique, les ingénieurs spécialisés dans les énergies renouvelables ou encore les coordinateurs de travaux de rénovation énergétique sont de plus en plus recherchés sur le marché du travail.  

Notre avis

France Stratégie avertissait récemment dans une note des risques de pénurie de main d’œuvre en France dans le secteur de la rénovation énergétique et du bâtiment. Comme l’AIE, l’institut s’inquiétait à juste titre d’un déséquilibre entre la demande et l’offre sur nos marchés.

Mais les acteurs de la transition énergétique ont conscience du problème et se mobilisent. Les mandataires doivent jouer leur rôle en orientant les bénéficiaires vers des artisans qualifiés, et leurs partenaires artisans vers les dispositifs de formation continue pour les aider à maintenir leurs compétences à jour.

Des actions intelligentes sont menées actuellement pour accélérer la formation de nouveaux professionnels comme la mise en place d’un label et d’une plateforme d’accès aux formations aux métiers de la transition énergétique par le Comité Stratégique de Filière « Nouveaux systèmes énergétiques », sous l’égide du Conseil National de l’Industrie.